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VII

EURÊKA.


Cette fois, soit que la gasconnade parût trop forte au baron, soit qu’il ne l’eût pas entendue, soit enfin que, l’ayant entendue, il ne fût point fâché de débarrasser la maison de son hôte étrange, il suivit des yeux Andrée jusqu’à ce qu’elle eut disparu ; puis, lorsque le bruit de son clavecin lui eut prouvé qu’elle était occupée dans la chambre voisine, il offrit à Balsamo de le faire conduire à la ville prochaine.

— J’ai, dit-il, un mauvais cheval qui en crèvera peut-être, mais enfin qui arrivera, et vous serez sûr au moins d’être couché convenablement. Ce n’est pas qu’il manque d’une chambre et d’un lit à Taverney, mais j’entends l’hospitalité à ma façon. Bien ou rien, c’est ma devise.

— Alors vous me renvoyez ? dit Balsamo en cachant sous un sourire la contrariété qu’il éprouvait. C’est me traiter en importun.

— Non, pardieu ! c’est vous traiter en ami, mon cher hôte. Vous loger ici, au contraire, serait vous vouloir du mal. C’est à mon grand regret que je vous dis cela et pour l’acquit de ma conscience ; car, en vérité, vous me plaisez fort.

— Alors, si je vous plais, ne me forcez pas à me lever quand je suis las, à courir à cheval quand je pourrais étendre mes bras et dégourdir mes jambes dans un lit. N’exagérez pas votre médiocrité, enfin, si vous ne voulez pas que je croie à un mauvais vouloir qui me serait personnel.

— Oh ! s’il en est ainsi, dit le baron, vous coucherez au château.

Puis, cherchant La Brie des yeux et l’apercevant dans un coin : Avance ici, vieux scélérat ! lui cria-t-il.