— Ah ! cruelle, vous me changerez en tigre.
— Maintenant, passons à la chanson, c’est madame de Grammont qui parle :
Monsieur de la Police, N’ai-je pas la peau lisse ? Rendez-moi le service D’en instruire le roi.
— Madame ! madame ! s’écria M. de Sartines furieux.
— Oh ! rassurez-vous, dit la comtesse, on n’a encore tiré que dix mille exemplaires. Mais c’est le vaudeville qu’il faut entendre.
— Vous avez donc une presse ?
— Belle demande ! Est-ce que M. de Choiseul n’en a pas ?
— Gare à votre imprimeur !
— Ah ! oui ! essayez ; le brevet est en mon nom.
— C’est odieux ! et le roi rit de toutes ces infamies ?
— Comment donc ! C’est lui qui fournit les rimes quand mes araignées en manquent.
— Oh ! vous savez que je vous sers, et vous me traitez ainsi ?
— Je sais que vous me trahissez. La duchesse est Choiseul, elle veut ma ruine.
— Madame, elle m’a pris au dépourvu, je vous jure.
— Vous avouez donc ?
— Il le faut bien.
— Pourquoi ne m’avez-vous pas avertie ?
— Je venais pour cela.
— Bast ! je n’en crois rien.
— Parole d’honneur !
— Je parie le double.
— Voyons, je demande grâce, dit le lieutenant de police tombant à genoux.
— Vous faites bien.
— La paix, au nom du ciel, comtesse.
— Comment, vous avez peur de quelques mauvais vers, vous, un homme, un ministre !
— Ah ! si je n’avais peur que de cela.