de Taverney ! cria Jean, en essayant de saisir l’effet que son nom lancé ainsi inopinément ferait sur le jeune homme.
En effet, Philippe leva la tête avec une vive surprise, dans laquelle entra un léger sentiment d’inquiétude ; mais, se remettant à l’instant même et ôtant son chapeau de la meilleure grâce du monde :
— Bon voyage, monsieur Jean Dubarry, dit-il.
La voiture partit avec rapidité.
— Mille tonnerres ! dit le vicomte en grimaçant, sais-tu que je souffre horriblement, petite Chon ?
— Au premier relais, nous demanderons un médecin pendant que cet enfant déjeunera, répondit Chon.
— Ah ! c’est vrai, dit Jean, nous n’avons pas déjeuné. Quant à moi, le mal m’ôte la faim ; j’ai soif, voilà tout.
— Voulez-vous boire un verre d’eau de la Côte ?
— Ma foi, oui, donnez.
— Monsieur, dit Gilbert, si j’osais vous faire une observation…
— Faites.
— C’est que les liqueurs sont une bien mauvaise boisson dans la situation où vous êtes.
— Ah ! vraiment ?
Puis, se retournant du côté de Chon :
— Mais c’est donc un médecin que ton philosophe ? demanda le vicomte.
— Non, monsieur, je ne suis pas médecin ; je le serai un jour, s’il plaît à Dieu, répondit Gilbert ; mais j’ai lu dans un traité à l’usage des gens de guerre que la première défense qu’on doit faire à un blessé, c’est l’usage de liqueurs, vins et café.
— Ah ! vous avez lu cela. Eh bien ! n’en parlons plus.
— Seulement, si monsieur le vicomte voulait me donner son mouchoir, j’irais le tremper dans cette fontaine, il envelopperait son bras de ce linge mouillé, et il en éprouverait un grand soulagement.
— Faites, mon ami, faites, dit Chon. Postillon, arrêtez ! cria-t-elle.