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une seule, entendez-vous ? dit le jeune homme en faisant siffler son épée.

— Nous ne partirons jamais, dit Chon à l’oreille de Jean, si vous ne prenez cet officier par la douceur.

— Il n’y a ni douceur, ni violence qui m’arrête dans mon devoir, dit Philippe en s’inclinant avec politesse, car il avait entendu la recommandation de la jeune femme ; conseillez donc vous-même l’obéissance à monsieur, ou, au nom du roi, que je représente, je me verrai forcé de le tuer s’il consent à se battre, à le faire arrêter s’il refuse.

— Et moi, je vous dis que je partirai malgré vous ! hurla le vicomte, en sautant hors du carrosse et en tirant son épée du même mouvement.

— C’est ce que nous verrons, monsieur, dit Philippe en tombant en garde et en engageant le fer ; y êtes-vous ?

— Mon lieutenant, dit le brigadier qui commandait sous Philippe six hommes de l’escorte, mon lieutenant, faut-il ?…

— Ne bougez pas, monsieur, dit le lieutenant, ceci est une affaire personnelle. Allons, monsieur le vicomte, je suis à vos ordres.

Mademoiselle Chon poussait des cris aigus ; Gilbert eût voulu que le carrosse fût profond comme un puits afin d’être mieux caché.

Jean commença l’attaque. Il était d’une rare habileté dans cet exercice des armes, qui demande plus de calcul encore que d’adresse physique.

Mais la colère ôtait visiblement au vicomte une partie de sa force. Philippe, au contraire, semblait manier son épée comme un fleuret et s’exercer dans une salle d’armes.

Le vicomte rompait, avançait, sautait à droite, sautait à gauche, criait en se fendant à la manière des maîtres de régiment.

Philippe, au contraire, avec ses dents serrées, son œil dilaté, ferme et immobile comme une statue, voyait tout, devinait tout.

Chacun avait fait silence et regardait ; Chon comme les autres.

Pendant deux ou trois minutes le combat dura sans que