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— Madame, répondit Balsamo avec le même respect, mais avec la même fermeté, à côté de la foi il y a la certitude.

— Vous parlez un peu obscurément, monsieur le sorcier ; je suis bonne Française de cœur, mais pas encore d’esprit, et je ne comprends pas très bien les finesses de la langue : il est vrai que l’on m’a dit que M. de Bièvre m’apprendrait tout cela. Mais en attendant, je suis forcée de vous prier d’être moins énigmatique, si vous voulez que je vous comprenne.

— Et moi, dit Balsamo en secouant la tête avec un mélancolique sourire, je demanderai à Votre Altesse la permission de rester obscur. J’aurais trop de regret de dévoiler à une si grande princesse un avenir qui, peut-être, ne serait point selon ses espérances.

— Oh ! oh ! ceci est plus grave, dit Marie-Antoinette, et monsieur veut piquer ma curiosité, espérant que j’exigerai de lui qu’il me dise ma bonne aventure.

— Dieu me préserve, au contraire, d’y être forcé, madame, dit froidement Balsamo.

— Oui, n’est-ce pas ? reprit la dauphine en riant ; car cela vous embarrasserait fort.

Mais le rire de la dauphine s’éteignit sans que le rire d’aucun courtisan lui fit écho. Tout le monde subissait l’influence de l’homme singulier qui était pour le moment le centre de l’attention générale.

— Voyons, avouez franchement, dit la dauphine.

Balsamo s’inclina sans répondre.

— C’est vous cependant qui avez prédit mon arrivée à M. de Taverney ? reprit Marie-Antoinette avec un léger mouvement d’impatience.

— Oui, madame, c’est moi.

— Comment cela, baron, demanda la dauphine, qui commençait à éprouver le besoin d’entendre une autre voix se mêler à l’étrange dialogue qu’elle regrettait peut-être d’avoir entrepris, mais qu’elle ne voulait pas cependant abandonner.

— Oh ! mon Dieu, madame, dit le baron, de la façon la plus simple, en regardant dans un verre d’eau.

— Est-ce vrai ? interrogea la dauphine revenant à Balsamo.