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au-devant de Son Altesse, m’a assuré que la princesse regarda plusieurs fois autour d’elle, cherchant dans les rangs des officiers qui assistaient à son dîner.

« — Je ne vois pas, dit Son Altesse, après une investigation pareille renouvelée inutilement deux ou trois fois, je ne vois pas le jeune officier qui a été envoyé au-devant de moi ce matin. Ne lui a-t-on pas dit que je désirais le remercier ?

« Le major s’avança.

« — Madame, dit-il, monsieur le lieutenant de Taverney a dû rentrer chez lui pour changer de vêtements et se présenter ensuite d’une façon plus convenable devant Votre Altesse Royale.

« Un instant après je rentrai.

« Je n’étais pas depuis cinq minutes dans la salle que madame la dauphine m’aperçut.

« Elle me fit signe de venir à elle, je m’approchai.

« — Monsieur, me dit-elle, auriez-vous quelque répugnance à me suivre à Paris ?

« — Oh ! madame ! m’écriai-je, tout au contraire, et ce serait pour moi un suprême bonheur ; mais je suis au service, en garnison à Strasbourg, et…

« — Et…

« — C’est vous dire, madame, que mon désir seul est à moi.

« — De qui dépendez-vous ?

« — Du gouverneur militaire.

« — Bien… J’arrangerai cela avec lui.

« Elle me fit un signe de la main, et je me retirai.

« Le soir, elle s’approcha du gouverneur.

« — Monsieur, lui dit-elle, j’ai un caprice à satisfaire.

« — Dites ce caprice, et ce sera un ordre pour moi, madame.

« — J’ai eu tort de dire un caprice à satisfaire ; c’est un vœu à accomplir.

« — La chose ne m’en sera que plus sacrée… Dites, madame.

« — Eh bien ! j’ai fait vœu d’attacher à mon service le premier Français, quel qu’il fût, que je rencontrerais en mettant le pied sur la terre de France, et de faire son bonheur et celui de sa famille, si toutefois il est au pouvoir des princes de faire le bonheur de quelqu’un.