Page:Dumas, Ascanio, t2, 1860.djvu/342

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
334
ASCANIO.

— Non, sire, il n’y a rien, répondit Benvenuto.

— Oui, mais il a pu y avoir quelque chose, dit Diane.

— Madame a raison, reprit Benvenuto.

— Maître ! s’écria le roi les dents serrées, savez-vous qu’il pourrait être dangereux de continuer plus longtemps cette plaisanterie, et que de plus forts que vous se sont repentis d’avoir joué avec ma colère ?

— Aussi serais-je au désespoir de l’encourir, sire, reprit Cellini sans se déconcerter ; mais rien ici n’est fait pour l’exciter, et Votre Majesté n’a pas pris, je l’espère, mes paroles au sérieux. Aurais-je osé porter si légèrement une accusation si grave ? Madame d’Etampes peut vous montrer les lettres que contenait ce lis si vous êtes curieux de les voir. Elles parlent bien réellement d’amour, mais de l’amour de mon pauvre Ascanio pour une noble demoiselle, amour qui au premier abord sans doute semble fou et impossible ; mais mon Ascanio s’imaginent, en véritable artiste qu’il est, qu’un beau bijou n’est pas loin de valoir une belle fille, s’est adressé à madame d’Etampes comme à une providence, et a fait de ce lis son messager. Or, vous savez, sire, que la Providence peut tout ; et vous ne serez pas jaloux de celle-là, j’imagine, puisqu’en faisant le bien, elle vous associe à ses mérites. Voilà le mot de l’énigme, sire, et si tous les détours où je me suis amusé ont offensé Votre Majesté, qu’elle me pardonne en se rappelant la précieuse et noble familiarité dans laquelle elle a bien voulu jusqu’à présent m’admettre.

Ce discours quasi académique changea la face de la scène. À mesure que Benvenuto parlait, le front de Diane se rembrunissait, celui de madame d’Etampes se déridait,