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conquérant. Dans toute guerre, les mères sont les pitoyables épaves de la gloire  ; il leur faut pleurer sur les enfants qu’on leur tue et sur ceux qu’on leur impose.

— Il n’est pas d’homme qui supportera quotidiennement la vue du parasite, décréta un embusqué.

— Ce parasite paiera des impôts, sera soldat dès sa majorité, et l’homme, qui le répudie aujourd’hui, admettra pourtant que sa vieillesse soit défendue par lui. D’ailleurs, l’abandon des innocents ne résoudrait pas le problème sentimental créé par la longueur des hostilités. Les mères ont eu le temps d’aimer les Campagneaux. Que fera-t-on contre cette tendresse ? Où donc est-elle la femme qui n’a point déjà caressé, embrassé son petit ?

— Enfin, que concluez-vous ? claironna un vieil industriel qui, depuis un an, portait sa moustache à la Joffre.

— Je ne me dérobe pas à cette tâche délicate et je me résume. Depuis trop longtemps, les faiseuses d’anges, l’amour du luxe, la sottise des modes et maintenant le canon, ont anémié notre Race. Eh bien, qu’il soit fait à tous les Campagneaux et à toutes les Campagnelles de cette guerre le même sort sans distinction d’origine, parce que toute unité nouvelle est, en ce moment, un bienfait. Le Nombre seul peut sauver notre avenir ; mais il faut que ce nombre soit béni et non pas maudit. La supériorité