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d’image dans le verre lisse. Rien ne se dessinait à sa vue.

— Je ne vois rien… Rien, dit-il un peu déçu…

— Comment, tu ne distingues pas ?

— Rien, je ne vois rien, tu perds la raison.

Pour la seconde fois, la nuit passa sur l’incident, et comme la bonne apportait le courrier en même temps que le chocolat, Monsieur Destange prit tout naturellement le paquet de lettres qui était sur le plateau le 28 mai 1915.

— Rien des enfants ? fit Gilette en baillant.

— Je ne trouve pas leur écriture… Ah ! oh !… ah ! par exemple !

— Quoi donc ?

— Ce n’est pas possible… Tu le savais !… Dis que tu le savais qu’il est blessé !…

— René ! René ? N’est-ce pas ? Où est-il ? Quelle blessure ?

Elle arracha des mains de son mari la lettre qu’il tenait et lut avidement :

« Monsieur, votre fils Monsieur René Destange, sergent au 25e est en traitement ici. Ses blessures à la tête sont assez sérieuses pour qu’on l’oblige à rester immobile. C’est pour cette raison que je vous écris ; il n’est atteint ni aux jambes ni aux bras. Il vous prie de préparer sa mère à la douloureuse nouvelle. Nous croyons que Madame Destange agirait sagement en ne témoignant