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— Il va chanter l’animal ! dit le docteur.

Aussitôt, Sylvia reprit le tampon et s’excusa.

— Pardon, Monsieur, j’irai là-bas quand mon devoir sera rempli ici ; cela n’a été qu’une seconde de faiblesse, pardonnez-moi.

— C’est tellement naturel, Madame ; mais je suis heureux que vous ayiez compris vous-même toute la grandeur de votre tâche. Bravo ! nous irons ensemble tout à l’heure auprès de votre mari.

Ils y allèrent en effet, dès que les existences qu’on leur avait confiées furent à l’abri de toute alerte.

La rencontre de Maurice Bertol et de Sylvia fut déchirante. Le major de la division, où on l’avait hospitalisé, venait de déclarer qu’une amputation immédiate s’imposait.

— Ma Sylvia, dit le moribond, si je guéris tu ne pourras plus m’aimer… Je serai infirme.

— Tais-toi, tais-toi, ne blasphème pas. À quelle heure aura lieu l’opération ?

— À trois heures cette après-midi.

— Dois-je lui amener les enfants auparavant, docteur, dit Madame Sylvia la voix basse.

— Oui !… laissa tomber le praticien.

C’était un arrêt de mort. Elle eut le courage de sourire au malade et de courir au Bouscat. Elle en revint avec ses trois petits qu’elle poussa vers le lit de fer.

— Papa, dit Emmeline, je suis là… regarde moi papa !