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CHAPITRE XV


Vers la fin du mois d’août 1914 la terreur fit son apparition dans la capitale.

On annonça coup sur coup que Lille avait capitulé, que Saint-Quentin était envahi, et l’on apprit brusquement que Compiègne avait abrité l’avant-garde d’une armée formidable. L’exode des civils commença dans une bousculade indescriptible : les wagons à bestiaux résumèrent le dernier mot du confortable pour millionnaires en débandade ; et Paris, débarrassé comme par enchantement de son élégance outrancière, devint silencieux et sévère comme une cathédrale.

Dans les rues, on ne voyait que des visages graves ; et jamais les hommes mûrs ne furent plus beaux qu’à cette période. Ils allaient par les trottoirs, le nez baissé sur les bulletins de défaites, ou les yeux désenchantés, perdus dans leurs anciens rêves. Tous semblaient ressasser la même phrase :