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alors que les banquiers germains commanditèrent des dessinateurs à la mode qui changèrent peu à peu la silhouette parisienne. Il fallut que les corsetières élargissent la taille au détriment des hanches ; puis le ventre disparut et rentra en lui-même. Enfin — quand celui-ci n’osa plus se montrer — on supprima la croupe. Ah ! les ridicules poupées que nous avons équipées.

— Que leur importe, riposta Madame de l’Écluse, elles n’en ont pas moins été aimées ; et l’amour triomphe de tous les ridicules.

— Non, Madame, l’amour n’a pas triomphé chez vous ! c’est chez nous qu’il est victorieux. L’amour aime ses aises, et l’amour est assez beau, pour se moquer d’être joli.

— C’est pour cela sans doute qu’en Allemagne les femmes sont épaisses et larges !

— Parfaitement, elles sont larges ! non pas comme chez vous selon les caprices de la mode, larges par les chapeaux ou les volants, mais larges de lianes et puissantes de mamelles.

— Comme cela doit-être excitant !

— Et pourquoi seraient-elles excitantes ? Avons-nous besoin qu’on harcèle notre désir pour qu’il s’exprime ? Nous ne sommes pas des dégénérés… nous sommes des mâles… nous savons fermer les yeux sur la matière et les ouvrir sur notre idéal.

— Bravo ! Bravo ! murmuraient comme des courtisans les officiers d’ordonnance enthousiasmés.