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qu’à cinq heures ; veuillez me laisser un mot si je puis revenir le soir. En ce cas, comptez sur moi. Au revoir, et croyez .......... »

« Mardi matin.

» Bien touchée de vos bonnes paroles ! regrette que vous ne puissiez venir demain à une heure ; je vous attendrai jusqu’à deux heures. Vous savez que j’ai des ménagements à conserver ; eh bien j’ai à mon service une personne que je ne puis garder. Il me faudrait cent cinquante francs demain soir pour la congédier ; et une fois débarrassée de la sus-dite je serai plus libre de mes actions. C’est tout vous dire. Tâchez à me faire parvenir cette modique somme demain et vous apprécierez et jugerez par vous-même de l’urgence de cette exécution. À demain donc vous ou mot me tirant d’embarras ; et à vous de cœur. »

« Mardi deux heures.

» Ma chère amie,

» Je reçois votre mot en rentrant chez moi. Vous n’avez pas été bien contente de ce que je vous ai écrit hier ? Moi, j’avais la mort dans l’âme à vous l’écrire. Mais convenez que vous m’avez traité très mal ; ne m’avez-vous pas vous-même forcé à me faire méchant ? Je vous jure que cela m’afflige au désespoir. J’avais rêvé que vous m’aimeriez un peu ; j’ai vu que le rêve était fou, et je me suis dit : tant pis, faisons comme les autres… Tenez : oubliez, et pardonnez-moi. Je vais venir dès ce soir ; soyez bonne, ne me renvoyez pas ; moi, de mon côté, je vous apporterai ce dont vous avez besoin. Laissons ces vilains ennuis ; vous verrez que je vous adore .......... »

Le soir, à neuf heures, elle n’était pas chez elle ; elle avait eu ma lettre ; elle ne m’avait pas laissé de réponse. Elle pouvait tout faire. La menacer, se fâcher, et lui demander pardon… Elle me tenait dès lors.