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« Tu n’es plus celle que l’amour glorifia,
« Tu n’es plus celle que le destin sanctifia,
« Tu n’es plus — celle-là…Elle ne peut prononcer
le nom qui
est le sien et qui
lui a été redit tout
à l’heure…



Ainsi parle la voix de la conscience  ;
Ainsi s en va le passe de l’existence.
L’amant n’est revenu
Que pour repartir dans l’inconnu ;
Des lointains de l’au-delà muet
C’est en vain qu’il a remonté vers la femme qui l’invoquait ;
Il passe,
Le chevalier d’amour, et dans le vide de l’espace
Il s’enfonce, il s’abîme, il s’efface.
Je suis la misérable femme ;
Dans ma pauvre âme
Rien ne peut-il plus refleurir ?
Le vent de perdition a-t-il tari la source du désir ?
Ô mon âme, ta vie vient-elle de finir ?

Voyez ! la nuit est maintenant en sa splendeur ;
C’est l’heure,
L’heure solennelle
Où la vision s’approcherait, si j’étais digne d’elle.
Voyez ! la nuit
Apaise tous les frivoles bruits,
Elle inaugure
Le règne de la conscience au fond des esprits de la nature ;
Mais lui
Qui sait celle que je suis,