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Ton sourire se manifeste tel
Que ce sourire que je porte dans mon âme fidèle.
Ah ! mon désir ?… N’interroge plus
Celui qui a laissé dans les lointains les plus perdus,
Dans les brumes les plus infranchissables de la vie
L’amie.


La Courtisane

Eh bien, écoute, tends l’oreille, approche-toi,
Afin d’ouïr les mots qu’il me plaît de verser en toi.
Oui, ma voix, c’est la même,
La même voix que celle que tu aimes ;
Mon front, en effet, a la semblance
De celle en qui tu mis ton espérance ;
Ou plutôt, vois ! mes yeux,
Oui, ce sont bien ses yeux ;
Et voici bien la bouche
De celle que ta jeunesse a rêvée pour sa couche.
Ne te l’avais-je donc pas dit ? dis ton désir !
Ton désir, quel qu’il puisse être, je suis souveraine pour l’accomplir ;
Je suis reine, je suis fée,
Je suis puissante à atteindre aux plus folles pensées.
… Si grand soit le désir,
Oh ! sachez que je suis la maîtresse de tout désir,
Et, dans l’enchantement d’un nouveau devenir,
Ne cherchez plus si des présages
Ont déchiré de leur éclair ces blancs nuages.