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VERS LES SOMMETS

À Saint-Paul-du-Gouffre, il aimait à aller jeter le filet à la mer, tendre une ligne à la Rivière des Mares, ou encore au Ruisseau des Monts. Sur la batture du fleuve à marée haute, trois ou quatre coups de filet suffisaient à emplir un tombereau de capelans, de sardines et d’éperlans. Tous les amis en recevaient une part. Son endroit favori était la Rivière des Mares. Quand il y allait, il disait qu’il se rendait à son « frisson ».

En effet, dans cette rivière en pleine forêt, aussitôt que l’hameçon était lancé à la surface du remous, la truite d’or le happait, la perche se courbait en arc. Le pêcheur joyeux n’avait qu’à donner un petit coup de gauche ou de droite pour accrocher sa proie frétillante, puis à lancer sa ligne en l’air, alors que le menu fretin s’agitait à l’extrémité et rebondissait de son propre poids, comme un pendule, entre les mains du pêcheur amusé. Jules avait connu toutes les émotions que peuvent faire éprouver la pêche et la chasse. Partout où il allait, on le voyait toujours accompagné du bon père Ben, le vieux serviteur de sa famille.

Cette année, il avait délaissé le sport des excursions pour la pratique active du droit et l’organisation politique de sa lutte. Depuis juillet, une fois la semaine, il tenait bureau d’avocat à Saint-Loup-