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son revenu, par cette seule raison qu’il est plus riche que Paul.

Il saute aux yeux, et il n’est pas nécessaire de démontrer que cet impôt dit proportionnel, n’est pas le moins du monde proportionnel pour ces deux personnages, l’un payant 10 %, l’autre 3.33 %.

Poursuivons le raisonnement : au lieu de 3.000 fr. de revenu total, Pierre en a 30.000, 300.000, 3 millions. Si ce revenu est en rentes sur l’État, il ne paiera pas un centime d’impôt, est-ce juste ? Et si ce revenu provient de toute autre nature de fortune, je dis encore qu’en portant le taux arithmétique de son impôt à 10, à 12, à 15, à 20% à mesure que s’élève le chiffre total de son revenu, on ne fait qu’établir une proportion plus juste entre son impôt et ses facultés, l’impôt est bien progressif par rapport au chiffre, mais il est, au contraire proportionnel, par rapport aux facultés. En un mot, un prélèvement de 15.000 francs d’impôt sur un revenu de cent mille est, en réalité, plus proportionnel aux facultés du contribuable qui possède ce gros revenu, qu’un prélèvement de cent francs sur le revenu de mille francs, seule ressource du petit contribuable. Ces mots proportion, progression, n’ont pas la même valeur arithmétique ni le même sens grammatical suivant qu’on les emploie au point de vue du chiffre abstrait, mathématique, du revenu, ou au point de vue des facultés concrètes, personnelles, du contribuable. Un prélèvement de 15.000 sur 100.000, ou de 200.000 sur un million de revenu ne produit pas, sur l’individu qui les possède, un amoindrissement de faculté aussi grand qu’un impôt de cent francs sur les mille francs formant le seul revenu du petit contribuable.