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fait avec les agents du contrôle une petite expédition dont le résultat pourra peut-être permettre d’arriver à un chiffre approximatif raisonnable.

Un jour du mois de décembre 1873, un commissaire de police, le sous-inspecteur du contrôle, un agent et moi, nous sommes partis de l’administration et nous avons pris route vers un des anciens boulevards extérieurs de Paris. Nous pénétrâmes dans une grande cour, cantonnée sur quatre côtés par des bâtisses légères, composées de tous les matériaux imaginables provenant de démolitions. Dans un coin, un vaste hangar en planches, surmonté d’un tuyau sans fumée ; fenêtres d’atelier, très-haut placées et que l’on ne pouvait atteindre ; porte close ; de l’intérieur, nul bruit perceptible. L’agent se retourna vers le commissaire de police et lui fit un clignement d’yeux qui signifiait : c’est là ; on frappa deux petits coups à la porte, qui s’ouvrit ; à peine fut-elle entre-bâillée, que l’agent y glissa son pied pour qu’il fût impossible de la refermer. On entra ; le sous-inspecteur nomma le commissaire et dit : « Eh bien, nous distillons donc clandestinement de l’alcool ? » L’ouvrier auquel on s’adressait, un colosse qui avait l’air d’un tambour-major en retraite et qui n’était qu’un ancien garçon boulanger, répondit : « Moi, je ne sais pas ; je fais ce que mon patron me dit de faire. »

C’était complet : deux fourneaux allumés, deux alambics en beau cuivre rouge, appareil pour brûler la fumée, afin qu’on ne la vit pas ; branchement sur l’égout pour l’écoulement de l’eau ; des fûts pleins de mélasse et des touries d’acide d’un côté ; de l’autre, des tonneaux remplis d’excellent alcool à 49 degrés (la mélasse contient 20 pour 100 d’alcool ; il suffit de la mettre en fermentation et de distiller pour obtenir de très-bons produits). Nous n’étions pas entrés que nous étions rejoints par six employés du contrôle, qui sortirent je ne