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Le mot volume n’a pas le même sens en langage de bibliophie qu’en langage vulgaire. Pour tout homme de bibliothèque, la pièce, — c’est-à-dire l’opuscule composé de moins de 48 pages, — ne devient volume qu’à la condition d’être réunie à cinq autres pièces ; isolée, selon qu’elle est reliée ou non, elle est plaquette ou brochure ; le public ne la nomme pas moins un volume. Pour savoir exactement tous ceux qui sont pressés les uns contre les autres dans les armoires sans vitrage de la rue Richelieu, il faudrait les compter un à un, travail excessif et qui n’aboutirait qu’à satisfaire une curiosité puérile ; il y a là un total que l’on ne peut qu’évaluer : 1 500 000 disent les uns, 1 800 000 disent les autres. Ces chiffres me paraissent au-dessous de la vérité. On se trouve, il est vrai, en présence de plaquettes minces comme un cahier de papier à lettres et d’antiphonaires dont le large dos couvrirait la moitié d’un lutrin ; mais l’épaisseur des uns compense la gracilité des autres, et la moyenne de la place exigée par un volume est assez correctement représentée par l’in-octavo relié de 400 pages. Un rayon d’un mètre en contient quarante. Or l’étendue des rayons du département des imprimés est de 55 kilomètres ; le nombre approximatif des volumes est donc de 2 200 000.

Aux personnes qui offrent quelques garanties et ont rempli certaines formalités imposées, la Bibliothèque prête les livres qu’elle a en double ; à tout le monde elle communique ce qu’elle possède, en ayant soin toutefois de prendre des précautions de prudence, lorsqu’elle met entre les mains d’un inconnu un volume rare ou précieux. Cependant elle garde à l’abri des regards indiscrets, sous clef, dans des cartons uniformes et sans titres, au fond d’armoires cachées que l’on nomme l’Enfer, une certaine quantité de volumes qui jamais, — sous aucun prétexte, — ne sont donnés