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raires, les tranchées gratuites qu’on ne peut rouvrir sans danger, on s’aperçoit avec stupeur que l’on reste en présence d’une superficie disponible équivalant à 34 hectares 1/2. Or, pour satisfaire aux besoins normaux de Paris pendant sept ans et en admettant qu’aucune cause fortuite ne vienne modifier la moyenne de notre mortalité ordinaire, si l’on veut supprimer l’insupportable fosse commune et accorder une durée double aux concessions temporaires, il faut 143 hectares au moins ; mais en réalité il en faudrait 170, car on doit toujours se mettre en mesure de parer à des éventualités possibles, et encore n’aurait-on aucun emplacement réservé pour les concessions perpétuelles, dont les exigences représentent un hectare par année. Il nous manque donc quatre fois ce que nous avons. Si l’on n’avise pas, il sera nécessaire de rendre aux sépultures banales des terrains saturés outre mesure et qui, si cela continue, rappelleront le pourrissoir des Innocents.

On demande à la terre un travail qu’elle ne peut produire : on veut que les tranchées gratuites, — où 20 centimètres seulement séparent les bières, — dévorent une énorme masse de corps en cinq ans. Cela est normal pour la première période ; pour la seconde, c’est déjà difficile ; à la troisième, c’est impossible : la terre, repue de matières animales, refuse de faire son œuvre. Lorsqu’une fosse commune est retournée pour la troisième fois, on est presque certain d’y retrouver les corps entiers : « Ils se sont saponifiés, » disent les savants. « Ils ont tourné au gras, » disent les fossoyeurs. En 1851, on fît des fouilles dans la partie du cimetière du Sud abandonnée aux hôpitaux ; les fosses, qui avaient sept mètres de profondeur, renfermaient des corps superposés ; les cadavres des couches supérieures étaient des squelettes, ceux des couches inférieures