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fusa énergiquement à toute réquisition, ferma ses portes qu’il ne laissa franchir à aucun détachement prussien, et à travers des difficultés qu’on peut à peine soupçonner, ravitailla l’asile de telle sorte, que nul n’y souffrit trop de la faim ni du froid. Dès le 14 septembre, aussitôt que les patrouilles prussiennes apparurent, il comprit que l’asile, n’étant point hôpital militaire et ne renfermant point de blessés, ne jouirait qu’à titre courtois et par conséquent fort aléatoire des bénéfices que la convention de Genève assure aux maisons hospitalières faisant fonction d’ambulance.

L’attitude des officiers, leurs demandes qui commençaient à ressembler terriblement à des contributions de guerre, ne lui laissèrent aucun doute sur le sort qui tôt ou tard lui serait réservé. Se rappelant notre vieux proverbe français qui dit qu’il vaut mieux avoir affaire au bon Dieu qu’à ses saints, il s’adressa directement au prince royal de Prusse, et il fit bien, car le 22 septembre il reçut du quartier général de Versailles un cartel de sauvegarde qui libérait l’asile de Vaucluse de tout logement, de toute réquisition militaires, et qui autorisait le directeur à circuler dans « toute la contrée » pour l’achat des vivres nécessaires aux aliénés. La bataille principale était gagnée, mais le directeur ne put éviter bien des escarmouches, dont il sut toujours se tirer à son honneur.

Ne limitant pas son rôle à la conservation de son personnel administratif et malade, il reçut les dépôts qu’on lui apportait de toutes parts, et malgré les sérieux périls auxquels il s’exposait, il abrita les fugitifs qui venaient lui demander secours ; il eut ainsi plus de trois cents femmes et enfants cachés dans l’infirmerie, la ferme et les bâtiments d’administration. Il fallait nourrir ce pauvre monde effaré et affamé ; ce fut là un surcroît de difficultés auxquelles on ne fit face que par des