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git point de donner des rentes à ceux qui en demandent ; la mission des bureaux de bienfaisance est heureusement moins difficile : elle consiste à venir en aide à un individu momentanément empêché, à soigner les malades, à permettre à l’ouvrier appauvri par suite d’un chômage forcé d’attendre des jours plus favorables.

En étudiant de près la population toute spéciale qui a sans cesse recours à la charité publique et privée, nous pourrons nous convaincre qu’elle est peu intéressante, qu’elle affecte la misère bien plus qu’elle ne la ressent et que l’administration qui gère le dépôt sacré du bien des pauvres est obligée à une extrême circonspection pour ne pas être abusée et dépouillée. Que de fois des gens qui avaient obtenu des bons de pain sollicités avec insistance les ont-ils cédés au boulanger, et ont acheté de l’eau-de-vie avec l’argent qu’ils avaient obtenu ? Que de fois ceux à qui l’on avait accordé plusieurs bons de viande (50 centimes ou 1 franc par bon) les ont accumulés, ont demandé au boucher un beefsteak en échange et ont été le manger au cabaret en l’arrosant d’un ou deux litres de vin ! Ces cas-là se présentent si fréquemment qu’on ne les compte plus, et l’on fait bien, car, en matière de charité, il vaut mieux être trompé cent fois que de se tromper une seule.

Chaque bureau de bienfaisance a sous sa direction immédiate plusieurs maisons de secours disséminées dans l’arrondissement et qui relèvent de lui, exactement comme il relève lui-même de l’administration centrale. Le nombre de ces maisons est arbitraire ; il en existe cinquante-sept à Paris, qui sont distribuées avec intelligence, selon la pauvreté, l’étendue des différents quartiers et les difficultés du parcours ; elles sont dans notre immense capitale comme ces refuges qu’on a établis sur la route de certaines montagnes que l’accumulation des neiges rend dangereuses pendant l’hiver.