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quelque propension à nettoyer son esprit lorsqu’on a l’habitude de nettoyer son corps. Aussi dans les dortoirs, devant chaque lit, s’étalent, contre les murailles, de grands lavoirs bien entretenus, où chaque pensionnaire trouve la brosse à dents, le peigne, le savon, qui lui sont indispensables. Cette exception toute protestante mérite d’être remarquée, car dans nul refuge catholique nous ne trouvons vestige de pareils soins, qui cependant sont élémentaires, ne serait-ce qu’au simple point de vue de la santé.

À Reuilly, les filles repenties n’ont point de dortoir ; isolées pendant la nuit, elles dorment chacune dans une chambre séparée qui leur laisse au moins ces heures de solitude dont toute âme a besoin pour se retrouver, sous peine de ne plus s’appartenir. On leur enseigne la couture et le blanchissage, de façon à leur donner la possibilité d’être plus tard de bonnes servantes ; on leur fait la classe et nulle ne sort de là sans savoir lire, écrire et posséder quelques éléments de calcul. L’œuvre, en un mot, a pour but, d’abord de ramener ces malheureuses aux notions du bien, de les forcer à rompre avec leurs habitudes prises ; puis de leur faire comprendre que, dans la vie, la moralité est non-seulement une vertu, mais qu’elle est aussi un avantage, et enfin de les mettre à même de subvenir par un travail régulier aux besoins de l’existence. Réussit-on ? Souvent. On s’occupe de les placer, généralement comme domestiques, en province, le plus qu’on peut, pour les enlever aux tentations de Paris, et jamais on ne les fait entrer dans une position quelconque sans avouer aux personnes dont elles vont dépendre, ce qu’elles ont été jadis et quelles épreuves elles ont traversées. On les suit, on les encourage, on veille sur elles de loin comme de près, et parfois on est arrivé à temps pour prévenir une défaillance nouvelle. Du reste, les chiffres suivants indiqueront dans quelle