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ler des maisons de refuge que la charité religieuse a ouvertes à leur repentir. C’est ce que je vais essayer de faire, sans me dissimuler aucune des difficultés de la tâche que j’entreprends.

Bien des rois de France, mus par un vif sentiment de moralité ou de piété, ont voulu en finir, d’un coup et pour jamais, avec les femmes de débauche vénale, qui semblaient vouloir agir comme aurait pu le faire une corporation reconnue et privilégiée. Les mesures les plus violentes, les plus inqualifiables, furent parfois décrétées contre ces malheureuses et restèrent sans effet, comme toute peine qui dépasse le but, comme resta inutile la fameuse ordonnance de 1536, qui punissait les ivrognes de la prison, du fouet, du bannissement et de l’essorillement. Charles VIII a beau ordonner qu’elles soient brûlées vives, le maréchal Strozzi a beau en faire jeter huit cents à la rivière, le lieutenant civil de la prévôté a beau, le 30 mars 1635, leur commander « de vuider la ville et les faubourgs, sous peine d’être rasées et bannies à perpétuité sans forme de procès », on n’arrive même pas à en diminuer le nombre. Ce fut en vain aussi qu’on essaya de les astreindre à un costume particulier et de leur interdire les costumes portés par les femmes honnêtes ; le proverbe subsiste encore : Bonne renommée vaut mieux que ceinture dorée. »

Saint Louis le premier les frappa à propos des habillements luxueux qu’elles portaient ; un manuscrit attribué à Sauval[1] raconte, à ce sujet, une anecdote caractéristique. La reine Marguerite de Provence, femme de Louis IX, allant à l’offrande, après avoir touché la patène de ses lèvres, se retourna, selon l’usage de la primitive Église encore conservé à cette époque, pour donner le baiser de paix à sa voisine ; elle embrassa une

  1. Bibl, imp., dép. des mass. fr., 13653 fr., suppl. fr., 4945.