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ser. On a déjà supprimé le trajet de Bicêtre à Paris, la longueur du temps qui précédait l’exécution, de sept heures du matin à quatre heures de l’après-midi, la lecture de l’acte judiciaire notifiant le rejet du pourvoi en cassation, le transport du condamné sur une charrette, de la Conciergerie à la place de Grève. Il reste encore bien des choses à supprimer. En matière de pénalité, tout ce qui n’est pas rigoureusement indispensable est cruel et doit, à ce seul titre, être impitoyablement exclu de la loi. On réveille le condamné une demi-heure avant le moment fatal, c’est trop du double ; un quart d’heure suffit amplement à son lever, à la toilette et à l’absolution, à laquelle une captivité d’un mois, des entretiens fréquents avec l’aumônier l’ont préparé depuis longtemps. À quoi bon, lorsque ce misérable est réveillé, lui enlever sa camisole de force pour la lui remettre immédiatement après ? Pour sauver une chemise appartenant à l’administration des prisons ? motif inavouable, que le moindre sentiment d’humanité devrait faire rejeter sans discussion. Rien, aujourd’hui, ne peut excuser la toilette. Pourquoi cette vieille cérémonie révoltante, qui pouvait avoir sa raison d’être lorsqu’on portait les cheveux longs ou la queue, et que l’action du glaive manié par l’exécuteur même pouvait en être paralysée, mais que le poids, la violence irrésistible du couperet actuel rendent radicalement superflue, ne tombe-t-elle pas d’elle-même en désuétude ? pourquoi, si l’on tient absolument à la conserver, comme une tradition reçue des ancêtres, ne pas l’accomplir dans la cellule même du condamné, afin d’abréger les angoisses de celui-ci et de le délivrer rapidement de la torture qu’il subit depuis son entrée en prison, car, il faut le dire, la guillotine est bien plutôt la fin du supplice que le supplice lui-même ?

Le sujet mérite qu’on s’y arrête. Refaisons le trajet de