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dre. Celle qui entre là est perdue, à moins de miracle, et le temps des miracles est passé. Les pauvres brebis égarées qu’on pousse dans ce mauvais bercail travaillent ensemble pendant le jour et dorment la nuit, comme on fait à la Santé, dans des cellules séparées. Avec leur robe brune, leur petit béguin, leur maintien qu’elles s’efforcent de rendre modeste, quelques-unes sont charmantes et font involontairement penser à Manon Lescaut.

Les autres détenues sont pêle-mêle jour et nuit ; dans les dortoirs, les couchettes sont pressées les unes contre les autres, et dans les ateliers les chaises se touchent ; un sous-brigadier et onze surveillants font le service des guichets d’entrée ; seul le brigadier a le droit de pénétrer dans les quartiers, dont les hommes sont sévèrement exclus. La maison, quoique sous l’autorité d’un directeur, est conduite, depuis le 1er  janvier 1850, par les sœurs de Marie-Joseph, auxquelles les longs vêtements de laine, les voiles bleu et noir donnent parfois, au fond des corridors demi-obscurs, l’air d’une apparition.

La maison ne chôme pas ; les allées et venues y sont incessantes, et plus d’une fois par jour les lourdes voitures cellulaires s’en font ouvrir les portes ; en 1868, les entrées de prévenues et de condamnées ont été de 2 720, les sorties de 2 859 ; la correction a vu entrer 232 jeunes filles, et 212 en sont sorties ; quant aux prostituées, elles ont donné 4 831 pour les entrées, et 4 719 pour les sorties ; le total des recluses infirmes a été de 200. Tout ce personnel qui, au 31 décembre, était représenté par 1 026 détenues de toute catégorie, a été assez paisible, car il n’a été atteint que par 201 punitions, et il a fourni 419 164 journées de travail.

C’est à Saint-Lazare, dans de vastes bâtiments annexés à la maison principale, que se trouvent les maga-