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sonniers ; mais elle n’est point suffisante pour tous les hommes, dont plus d’un souffrirait de la faim, si le denier de poche ne leur permettait de faire quelques achats à la cantine établie dans toute prison. Chaque jour, le détenu reçoit un pain cuit la veille et pesant réglementairement 750 grammes ; le dimanche et le jeudi, il a, le matin, cinq décilitres de bouillon gras et une ration de 125 grammes de viande de bœuf bouilli, qui devrait être servie chaude ; les lundi, mardi, mercredi, vendredi et samedi, sa pitance, — c’est le mot consacré, — se compose de cinq décilitres de bouillon maigre et de quatre décilitres de demi-secs, c’est-à-dire de pois, de haricots, de lentilles, de pommes de terre ou de riz ; c’est ce que l’argot des prisons appelle : des vestiges. La nourriture, on le voit, n’est point trop abondante ; elle a pour base principale le pain, qui est bis-blanc, et ne parait pas être ordinairement de mauvaise qualité. Du reste, un spécimen de pain, pris au hasard, est envoyé, tous les jours, au chef de la première division de la préfecture de police, qui peut, au besoin, donner ordre de recommencer les fournées.

Les détenus sont libres de faire venir leurs repas du dehors ; il y en a beaucoup, dont les familles habitent Paris, qui reçoivent à manger de chez eux. Lorsqu’un prisonnier est pauvre, que son ignorance d’un métier productif l’empêche de gagner assez d’argent pour acheter des vivres à la cantine et que la pitance quotidienne ne suffit pas à calmer son appétit, le médecin ordonne pour lui un supplément de nourriture, qui n’est jamais refusé. Les vêtements et le linge sont aussi fournis par l’administration : des chaussons et des sabots, un pantalon, une veste, un bonnet de drap grisâtre, d’aspect singulièrement triste ; tous les mois, une paire de draps, et, tous les huit jours, une chemise en toile solide et résistante, mais si dure, qu’on la nomme la limace ; en