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travers des points noirs ! » L’emblème par excellence de la royauté française était une prison d’État, la Bastille. Elle écroulée, tout s’écroula[1].

Jusqu’en 1789 il exista en France trois sortes de prisons : les prisons royales, les prisons seigneuriales, les prisons de l’officialité (appartenant aux évêques) ; elles étaient régies par les ordonnances caduques de Charles VI, de François Ier, et par l’ordonnance plus prévoyante de 1670. Malgré les traitements qu’on y éprouvait, elles n’étaient que l’antichambre de la justice, des galères ou de l’échafaud. Sous l’ancien régime, l’emprisonnement ne constituait pas une pénalité, il n’avait d’autre but que de s’assurer de la personne même de l’inculpé. Ce fut l’Assemblée législative qui, en 1791, considéra la privation de la liberté comme une punition dont la durée devait être graduée selon l’importance du crime ou du délit.

Les prisons furent alors divisées en quatre catégories, qui répondaient d’une façon à peu près suffisante aux besoins de la justice ; c’étaient : 1° les maisons d’arrêt ; 2° les prisons pénales criminelles, dans lesquelles il faut comprendre les bagnes, les maisons de force et les maisons de gêne[2] ; 5° les prisons pénales correctionnelles ; 4° les maisons de correction destinées aux enfants âgés de moins de seize ans et aux jeunes gens mineurs arrêtés et détenus à la demande de leurs parents. Ce système, malgré quelques légères modifications apportées en l’an IV, subsista jusqu’en 1810, année où furent inaugurées les maisons centrales. Toutes ces réformes, dont l’importance n’est pas discu-

  1. On m’a fait observer qu’au 14 juillet 1789 la Bastille ne renfermait que sept prisonniers ; je le sais ; j’ai simplement voulu dire que l’incarcération arbitraire, par mode de lettres de cachet, était en quelque sorte l’emblème de la royauté absolue.
  2. La gêne, peine qui ne fut jamais appliquée, isolait absolument le condamné et ne laissait à sa disposition aucun moyen de travail.