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l’Évêque trouvée par lui dans un « projet concernant l’établissement de nouvelles prisons dans la capitale », manuscrit rédigé par un magistrat du dix-huitième siècle. Le tableau est peint sur le vif :

La cour ou préau n’a que trente pieds de long sur dix-huit de large, et c’est dans cet espace qu’on enferme quelquefois quatre et cinq cents prisonniers… Les cellules qui sont sous les marches de l’escalier ont six pieds carrés ; on y place cinq prisonniers… Les cachots sont au niveau de la rivière, la seule épaisseur des murs les garantit de l’inondation, et toute l’année l’eau filtre à travers les murs. Là sont pratiqués des réceptacles de cinq pieds de large sur six pieds de long, dans lesquels on ne peut entrer qu’en rampant et où l’on enferme jusqu’à cinq détenus. Même en été, l’air n’y pénètre que par une petite ouverture de trois pouces, percée au-dessus de l’entrée, et lorsqu’on passe en face, on est frappé comme d’un coup de feu. Ces cachots, n’ayant de sortie que sur les étroites galeries qui les environnent, ne reçoivent pas plus de jour que ces souterrains où l’on n’aperçoit aucun soupirail. Le Grand et le Petit-Châtelet sont encore plus horribles et plus malsains. » Du reste, si l’on veut savoir à quoi s’en tenir sur les prisons du Châtelet, il faut lire l’Enfer de Clément Marot qui, en 1515, y fut enfermé « pour cause de religion », et à qui le souvenir de ce qu’il avait supporté inspira son poème.

Lorsque, dans ces prisons, quelque prisonnier faisait résistance, on n’y allait pas de main morte, le 11 juin 1723, un certain Chevet, détenu au For-l’Évêque, parce qu’il était impliqué dans une affaire de banqueroute, reçut ordre de quitter la chambre qu’il occupait et de se rendre dans une autre. Il refusa d’obéir, on voulut le contraindre ; mais, ayant trouvé moyen de s’armer d’une fourche et d’un couteau, il se mit en rébellion ouverte.