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indemne et sans flétrissure au sein de la société. Si le crime ne tombe pas sous le coup d’un des articles du code, l’accusé est simplement absous. La cour d’assises juge sans appel ; mais, comme il peut s’être glissé quelques erreurs de forme dans la procédure, le président prévient le condamné qu’il a trois jours pour se pourvoir en cassation. Les gendarmes emmènent celui-ci, qui descend l’escalier en vrille où le bruit des pas retentit lugubrement, et il reprend sa place dans une cellule de la Conciergerie.

Si criminel que soit un homme, l’idée de justice est très-vivante en lui lorsqu’il s’agit de son propre intérêt. On avait jugé en même temps que Firon un marchand de vins nommé Rezet, auquel il avait confié un coffret renfermant les billets de banque volés avec effraction dans le secrétaire de M. de Tessan. Rezet, sachant que son ami était arrêté, brisa la boite et mena joyeuse vie avec l’argent qu’elle contenait. Accusé de complicité par recel, sans que le président ait pensé à poser la question de violation de dépôt, Rezet fut acquitté. Le premier mouvement de Firon arrivé dans son cachot, au moment où l’on allait le revêtir de la camisole de force, fut de la colère : « J’ai mérité mon sort, dit-il, mais qu’est-ce donc qu’un jury pareil ? Est-ce que Rezet ne m’a pas volé, moi ? Pourquoi donc ne l’a-t-on pas condamné ? »

Il est certaines villes privilégiées où parfois la cour d’assises ne siège pas, car nulle affaire n’est inscrite au rôle de la session ; il n’en est pas de même à Paris, où le crime est toujours sur pied. En 1868, la cour d’assises de la Seine a jugé 489 affaires qui concernaient 657 accusés, dont 534 hommes et 123 femmes ; 143 ont été acquittés et 504 ont été atteints par des condamnations : 14 ont entendu prononcer contre eux la peine des travaux forcés à perpétuité ou celle de la réclusion perpé-