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rupture de ban ; le 12, on découvre le marchand d’habits chez lequel il a acheté des vêtements neufs ; le 13, au petit jour, on arrive dans le garni où il a dormi, mais d’où il vient de sortir ; le 14, il est arrêté à sept heures du matin, au moment où il entre dans une auberge de la rue Saint-Honoré. Amené au Dépôt, on le fait voir, sans éveiller ses soupçons, par les hommes de la musique, qui le reconnaissent pour le nommé Barthélémy Poncet, frappé de huit ans de travaux forcés, évadé de Cayenne. Le 15 janvier 1866, il fut condamné à la peine capitale par la cour d’assises de Versailles.

Il y a des criminels qui débutent par un coup d’éclat, qui n’ont aucun antécédent auquel on puisse se raccrocher, qui ont vécu solitaires, et que nul indicateur, nul agent ne connaît : Troppmann était ainsi. — Les moutons qu’on avait placés prés de lui à Mazas n’en pouvaient rien tirer, et, malgré son inconcevable vanité, il restait impénétrable. Ce fut un sous-brigadier de la sûreté, M. Souvras, qui seul parvint à le confesser et à forcer cette brute à se découvrir tout entière. Il finit par gagner sa confiance, par obtenir un aveu complet et par savoir exactement où le corps de Kinck père avait été enfoui. M. Souvras dirigea les recherches et trouva le cadavre : pièce de conviction de la plus haute importance, sans laquelle la justice égarée pouvait croire à la complicité de cette première victime, et cette croyance aurait singulièrement modifié l’instruction, les débats judiciaires, et peut-être même le verdict du jury.

Autant que possible, et à moins qu’ils n’y soient contraints par des circonstances spéciales, les inspecteurs de la sûreté n’arrêtent jamais personne dans un lieu public, bal, café, cabaret, théâtre ; ils filent l’individu recherché lorsqu’il sort, et s’en emparent au coin de quelque rue déserte, ou quand il passe devant un poste de police dans lequel ils peuvent le faire entrer immédiate-