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s’en vend à l’abattoir central pour une somme de 16 000 francs environ.

Les bouchers ne sont plus aujourd’hui ce qu’ils ont été jadis, une corporation toute-puissante, formée d’un certain nombre de familles privilégiées, et imposant souvent leurs volontés à Paris, ainsi qu’ils le firent sous le règne de Charles VI, lorsqu’ils prirent parti pour le duc de Bourgogne contre les Armagnacs. En 1411, les Saincts-Yons, les Goys, dirigés par leur chef Caboche, eurent assez d’influence pour forcer le roi à substituer dans ses emblèmes la couleur blanche à la couleur bleue. On peut penser que lorsque les Armagnacs rentrèrent à Paris, ce ne fut point pour ménager de pareils adversaires ; en effet on rasa les grandes boucheries du Châtelet et du parvis Notre-Dame, qui étaient devenues des lieux de rassemblements redoutables. « Le vendredy, quinzième jour du dit mois (février 1416), dit le Bourgeois de Paris, firent commencer à abattre la grande boucherie de Paris ; et le dimanche ensuivant vendirent les bouchers de ladite boucherie sur le pont Nostre-Dame, moult ébahis pour les franchises qu’ils avaient en la boucherie, qui leur furent ostées. »

Ce fut là en réalité le coup de mort pour la corporation, qui n’arriva jamais à se reconstituer d’une façon exclusive. Plus tard, en février 1587, Henri III continua l’œuvre de destruction et ouvrit le commerce de la boucherie à tous ceux qui se montrèrent capables de l’exercer. Néanmoins il en fut des bouchers comme des boulangers, la prétendue liberté dont ils jouissaient n’était qu’illusoire, et la loi du 19-22 juillet 1791 réserve provisoirement à l’autorité municipale le droit de fixer la taxe de la viande. Cette mesure durait encore il y a quelques années et dura jusqu’au décret du 28 février 1858, qui proclamait la liberté de la boucherie ; mais légalement le droit de taxation appartient toujours aux