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ne jugent que sur pièces à l’appui, comme ferait une cour des comptes, et relèvent les erreurs, s’il y en a. Il suffit parfois d’une virgule mal placée pour mettre en déroute une colonne de deux cents chiffres. Un effet de 16,55 a été inscrit 1 655 ; il faut tout recommencer, tout reprendre, et finir, à force de soins, de patience, de perspicacité, par découvrir pourquoi les totaux ne sont pas en concordance exacte. On peut dire que la Banque ne se couche qu’après avoir mis ses comptes à jour, car tant qu’une erreur n’est pas rectifiée, on veille et l’on travaille, quand même le gaz éteint aurait fait place au jour.

Grâce à cette façon de procéder, la Banque sait toujours où elle en est. Chaque soir, son passif est aligné en balance avec son actif. À quelque heure que ce soit, elle est prête à liquider, à rendre compte de sa gestion, car à chaque minute elle sait combien elle a de billets en circulation, combien en caisse ; ce que valent son portefeuille, sa réserve métallique, combien elle possède à Paris, combien dans les succursales. C’est là le triomphe de l’ordre, de l’activité et de la prudence. Quand on pense aux millions qui se brassent du matin au soir, aux opérations nombreuses et aux formalités multiples qu’elles entraînent, on est confondu que tout soit apuré chaque soir. En arrivant à leur bureau, les hauts fonctionnaires et les principaux employés reçoivent une feuille formulée d’avance sur laquelle on n’a plus que des chiffres à écrire et qui contient la situation de la veille. On sait donc toujours avec certitude sur quel terrain l’on marche, et ce n’est pas une cause de minime étonnement pour ceux qui pénètrent la première fois dans les mystères sans secret d’une si grande institution.