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qui aujourd’hui sont si bien entrées dans leurs mœurs, qu’elles font partie de leurs habitudes et qu’on n’a même plus à les leur rappeler.

Les pavillons portent des numéros d’ordre qui leur servent de dénominations officielles, mais les gens des Halles ont leur vocabulaire ; au lieu du pavillon n° 3, ils disent la Boucherie ; au lieu du pavillon n° 9, ils disent la Marée, et, fait plus étrange, au lieu du n° 11 où se vend la volaille et le gibier, ils disent la Vallée. Ce marché se tenait jadis sur le quai de la Mégisserie qu’on appelait alors la Vallée de la Misère[1], à cause au grand nombre d’oiseaux, d’agneaux, de cochons de lait qu’on y faisait mourir. La Vallée de la Misère devint peu à peu et simplement la Vallée ; quand la vente de la volaille fut établie dans le triste et froid bâtiment élevé en 1809, par Lenoir, sur l’emplacement du couvent des Augustins[2], le vieux nom s’imposa à la construction nouvelle, et récemment il a suivi les marchands lorsqu’ils sont venus s’installer aux Halles centrales.

On pense bien que les places ne sont pas gratuites dans les pavillons, mais le prix qu’on exige varie selon les denrées. Les étaux de la boucherie sont loués 3 francs par jour ; les comptoirs de la marée, 1 fr. 25 ; ceux du poisson d’eau douce, 1 fr. 50 ; ceux de la volaille, 1 franc ; ceux de la verdure, 75 centimes ; ceux des huitres, 20 centimes ; les resserres, à quelque catégorie qu’elles appartiennent, ont un prix de location uniforme : cinq centimes par jour et par mètre super-

  1. Dans le principe, ce marché était au parvis Notre-Dame, et je lis dans le Dictionnaire de Jean de Garlande, écrit vers 1090 : « In platea nova ante paravisum domine nostre, aves inveniuntur vendende, anseres, galli el galline, capones, anates, perdices phasiani, alaude passeres, pluvinarii, ardee, grues el cjgni, pavones et turtures. »
  2. Le marché à la volaille du quai des Augustins a été démoli pour faire place à des maisons. Il n’en subsiste plus aujourd’hui (avril 1875) que trois arcades, qui abritent une remise de l’entreprise générale des omnibus.