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s’il n’y a ordre contraire, seront employées au profit du privilégié ! Combien de permissions il faudra lui payer !

3o Il existe une infinité de cas où, malgré l’intention de nous conformer au règlement du privilége, nous sommes pris en contravention. Voici quelques exemples :

Nous aurons pris la permission de mener une compagnie à Versailles ; cette compagnie veut ensuite voir Saint-Germain ou Marly, elle oblige le cocher de revenir par là. Les commis ambulants qui rôdent partout ne manquent pas d’arrêter la voiture, nonobstant la permission, parce que cette permission n’est que pour Versailles, et non point pour la route de Saint-Germain. La confiscation s’en suit, nous sommes condamnés à une amende de 1 500 livres ou à une moindre somme, si tous nos moyens ne peuvent y atteindre.

Autre cas : nous aurons loué une voiture pour aller dans une maison de campagne aux environs de Versailles ou de Saint-Cloud, ou autres endroits prohibés ; il vient aux voyageurs l’envie de faire une apparition dans ces endroits prohibés ; nos cochers, nos postillons se prêtent à leur fantaisie, par l’appât d’une récompense, et quelquefois ils y sont forcés par les menaces ; qu’est-ce qui s’en suit le plus souvent ? la confiscation et l’amende.

Enfin, le privilégié ne se contente pas d’arrêter nos voitures à l’entrée, ou dans l’enceinte des endroits prohibés, il suffit qu’il les rencontre sur les routes qui y conduisent ; ses commis nous arrêtent partout où ils nous trouvent, la nuit comme le jour, sans égards pour les voyageurs, qui quelquefois dorment et se réveillent épouvantés par la voix impérieuse qui crie d’arrêter : on a vu en pareil cas des femmes prendre les commis ambulants pour des voleurs, et se trouver mal de frayeur.

À défaut de permission, il faut entrer en explication, déclarer où l’on va et d’où l’on vient. Les commis interprètent les déclarations à leur gré, et le sort de nos voitures dépend de leurs soupçons ou de leur crédulité. Leur certificat fait la loi.

Il est inutile de citer d’autres exemples de gênes et de vexations ; l’expérience publique y suppléera.

§ 3. — Doléances contre le privilége des diligences et messageries du royaume.

Ce privilége exclusif est affermé 1 100 000 livres par an. Mais si l’on en croit la voix publique, ce fermage n’a jamais été bien payé, et il en a souvent coûté des sommes considérables au roi pour soutenir cet établissement ; car telle est la ressource du privilégié : s’il gagne beaucoup, il se tait ; s’il perd, il parle, il se plaint, et il obtient des indemnités ou des extensions de droits.

En tous cas, les abus qui résultent de l’administration de ce privilége sont innombrables. Nous invoquons à cet égard les témoi-