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mort. — Suicide ou homicide, — causes présumées. — Envoyé par le commissaire de… — Lieu où le cadavre a été trouvé. — Autopsie. — Date de l’inhumation. — Observations. — Il faut naturellement qu’un corps soit reconnu pour que toutes ces questions reçoivent une réponse.

La Seine rend bien des cadavres, mais elle en garde quelques-uns ; les gens qui périssent par accident ne sont pas tous retrouvés, et il arrive très-souvent que des personnes n’ayant pas vu revenir un parent ou un ami vont le chercher à la Morgue, où il n’est pas. Le greffier alors, avec une perspicacité de juge d’instruction, interroge le réclamant, et sur un registre de renseignements il inscrit la date de la disparition, les nom et prénoms, la demeure, le signalement détaillé, les vêtements, les signes particuliers, sans oublier les tatouages, la marque du linge, les anneaux d’oreilles et certains appareils chirurgicaux que les gens du peuple, accoutumés aux métiers pénibles, sont souvent obligés de porter. Dans ces sortes d’interrogatoires, qui presque toujours s’adressent à des personnes d’une éducation restreinte et d’une instruction trop imparfaite, il faut développer une patience, une sagacité extraordinaire. J’ai entendu là des dialogues inconcevables. — Quelle forme à son nez ? — Ah ! dame ! je ne sais pas. — A-t-il le nez droit, aquilin, retroussé ? — Mais, ce pauvre homme, monsieur, il a un nez comme tout le monde. — De quelle couleur sont ses vêtements ? — Ah ! je ne sais pas ; je sais seulement qu’il avait un gilet. — Et de tout ainsi ; ce n’est le plus souvent qu’à force de reprendre les questions sous toutes les faces imaginables, qu’on arrive à découvrir une indication qui permettra d’entreprendre des recherches sérieuses.

Le greffier actuel de la Morgue à la passion de l’identité, et il n’épargne nulle peine pour arriver à recon-