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les auges sont déposées avec les truelles, se rendre à leurs chantiers. À cette vue, que penseraient les entrepreneurs des carrosses à cinq sols qui, dans leurs placards de mai 1662, avaient soin de dire : « On fait aussi sçavoir que par l’arrêt de vérification du Parlement, défenses sont faites à tous soldats, pages, laquais et tous autres gens de livrée, manœuvres et gens de bras d’y entrer, pour la plus grande commodité et liberté des bourgeois. » Aujourd’hui il n’y a point de coin de rue, de carrefours, de quais et de boulevards où l’on ne trouve des coupés, des calèches, des fiacres et des omnibus ; le nombre s’en accroît tous les jours, et grâce au décret du 23 mai 1866 qui reconnaît la liberté illimitée en pareille matière, le chiffre des voitures de louage ne fera qu’augmenter encore. Cela est fort bien fait ; mais un tel état de choses n’a pas été improvisé en un jour, car voilà près de deux cent trente ans que le premier fiacre s’est montré à Paris.

Au commencement du dix-septième siècle, il n’existait qu’une seule entreprise de chaises à bras qu’on pouvait louer ; elle avait été créée en 1617. les porteurs savaient faire payer les clients récalcitrants : on peut à ce sujet consulter les Précieuses ridicules[1]. Ce fut en 1640 qu’un certain Nicolas Sauvage, facteur des maîtres de coche d’Amiens, imagina d’établir des carrosses qui, toujours attelés et stationnaires dans des quartiers désignés, se tiendraient à la disposition du public. Ces voitures furent appelées fiacres ; est-ce parce que Sauvage habitait dans la rue Saint-Martin, en face de la rue de Montmorency, une maison qui avait pour enseigne l’image de saint Fiacre ? Est-ce parce que vers cette époque un moine des Petits-Pères, nommé Fiacre, mourut en odeur de sain-

  1. Il y avait aussi les vinaigrettes ; Lister en parle : « C’est, dit-il, une caisse de voiture sur deux roues, trainée par un homme et poussée par derrière par une femme ou un enfant, ou bien par tous les deux à la fois » (Voyage de Lister à Paris en 1698, p. 27.)