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Paris à Landau. Il serait trop long et superflu de raconter à travers quels obstacles elle fut établie, mais il faut dire cependant que Claude Chappe ayant demandé à la commission des armées 6 168 livres de fil de laiton destiné à faire mouvoir les appareils, on ne put jamais lui en fournir que 327. Il y suppléa en obtenant de la gérance des biens nationaux l’autorisation de prendre et de garder pour l’usage des télégraphes les cordelettes de métal qui servaient autrefois à suspendre les lampes et à attacher les girandoles dans les hôtels et les maisons riches dont le mobilier avait été en grande partie confisqué.

Pendant les premiers temps, la maison habitée par Chappe avait été le centre de son administration ; mais cette dernière s’étendait, devenait considérable, faisait concevoir des espérances d’agrandissement qu’elle a réalisées ; on lui chercha en conséquence un local convenable, et on l’installa (nivôse an III) à l’ancien hôtel Villeroy, rue de l’Université, no 9. La direction des télégraphes y demeura jusqu’au jour où elle fut réunie au ministère de l’intérieur, rue de Grenelle[1]. La télégraphie ancienne, uniquement due à la découverte de Claude Chappe, à l’initiative intelligente de Romme, de Lakanal et de Carnot, devait recevoir de chaque gouvernement successif le développement qu’elle comportait ; mais il ne fut point donné à l’inventeur d’y apporter son concours et d’en jouir. Il avait vu tomber la République et naître l’Empire ; il était demeuré immuable à son poste, dirigeant l’administration dont il était le créateur. Tant de fatigues, tant de luttes l’avaient épuisé ; devenu hypocondriaque, atteint d’une maladie insupportablement douloureuse (un cancer dans l’oreille), il se sentit si découragé, si vaincu, qu’il de-

  1. La rue Neuve de l’Université a été ouverte sur l’emplacement de l’ancien hôtel des télégraphes ; c’est aujourd’hui la rue du Pré-aux-Clercs.