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pondre avec la famille royale, alors détenue au Temple, et élevé pour compromettre les nouvelles destinées de la nation. Un matin, un groupe d’hommes se précipita dans le parc de Ménilmontant, démolit la station, brisa le télégraphe, le jeta au feu et faillit en faire autant des frères Chappe, qui n’eurent que le temps de se sauver. Le 12 septembre 1792, Claude Chappe écrivit à l’Assemblée pour lui demander de protéger ses travaux et de l’indemniser des pertes que la bêtise populaire lui avait fait subir. Il ne reçut pas de réponse, car le 21 septembre la Convention nationale tint sa première séance.

Pendant de longs mois il ne fut plus question de l’invention nouvelle ; Chappe fatiguait les bureaux et les comités de ses démarches inutiles. Ce fut pendant une de ces audiences qui bien souvent désespéraient l’inventeur, que sa machine reçut son baptême définitif. Miot de Mélito raconte[1] que Chappe vint le voir au ministère de la guerre et lui donna de minutieux détails sur son appareil, qu’il nommait alors le tachygraphe (ταχὐ-γράφειν, écrire promptement). Miot lui dit que la dénomination était vicieuse et qu’il devait la changer en celle de télégraphe (τῆλε-γράφειν, écrire de loin). Chappe fut frappé de la justesse de l’observation et adopta l’appellation, qui depuis ce temps a prévalu. C’était beaucoup d’avoir trouvé un nom composé qui renfermât une définition exacte, mais ce n’était pas tout : il fallait faire sortir le projet des cartons où il demeurait enfoui, et il y serait peut-être resté longtemps encore si Romme ne l’y eût découvert. Nous avons dit plus haut à travers quelles circonstances il obtint de la Convention nationale que 6 000 livres seraient accordées à Chappe pour faire des essais sérieux et qu’une commission serait nommée pour les suivre.

  1. Mémoires, t. Ier, p. 38.