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n’est pas un despote : mais ce ne sont pas là les idées en Angleterre, où on se figure la France, comme royaume, où la volonté du monarque est l’unique loi de l’État ; aussi au nom des lois françaises, réinstallées dans la colonie, en vertu du bill de Québec, s’est-on cru autorisé d’y ériger un despotisme, armé de tous les pouvoirs, qui en théorie étaient propres à le rendre formidable et tyrannique, et à l’inviter à l’être. En effet la puissance d’un gouverneur de Québec dévore, engloutit toute autre puissance dans le pays ; il est universellement maître souverain de tout ; à titre de généralissime des forces de Sa Majesté, il dispose en arbitre du militaire : par la dépendance sous qui rampent tous les membres du corps législatif, qu’il crée ou dépose à son choix, ils ne peuvent être que l’écho de ses ordres, s’ils ne veulent être sur le champ dégradés et cassés ; le voilà constitué le seul législateur de la province.

Par le rétablissement des corps de milice, dont il nomme tous les officiers, il tient à la gêne et sous le joug les paroisses, qu’il accable de charges et de corvées au gré des ses caprices : enfin, en qualité de grand chancelier, président né de toutes les cours de judicatures, dont il place et déplace à son gré les juges, confirme ou casse par voie de fait les arrêts, c’est lui et lui seul qui en personne, ou par ses substituts, rend les oracles de la justice, selon qu’il plaît à ses passions de les dicter : pour comble de suprématie universellement despotique, sa personne est