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Chaque colonie fut taxée à sa mise proportionnelle de soldats. Les Canadiens avaient été, pour le grand nombre, élevés parmi ces peuples, compagnons de leur jeunesse, leurs amis de tous les temps, et même leurs parents, par le mélange de sang : il était de la dernière atrocité, de les mettre aux prises avec de si chers ennemis ; pour s’inscrire avec légitimité contre leur enrôlement, ils pouvaient tous d’ailleurs se réclamer des dix huit mois, qui, à l’époque de cette expédition, venaient de leur être assignés à Fontainebleau, pour décider et arranger leur transmigration en France. Mais le général en chef prononça différemment. Montréal et les Trois-Rivières (encore alors sous des gouvernements particuliers) rejetèrent hautement de souscrire à cette décision. À Québec, le général Murray, l’ami, le protecteur et le père du peuple, n’eut que la peine de lui notifier ses inclinations ; les Canadiens, de leur propre mouvement, volèrent par bandes sous les drapeaux de Sa Majesté, et formèrent une brigade de 600 hommes, la plus leste, la plus brave, en un mot la fleur et l’élite de toute l’armée provinciale.

Les généraux commencèrent par dégrader ces généreux volontaires en serviteurs, et en laquais, de tout le corps militaire, dont, en bêtes de somme, ils étaient chargés de voiturer sur les épaules les bagages dans les portages, de préparer les diverses cuisines, et d’effectuer à force de bras le transport en