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LES AMAZONES,

Ce n’eſt point notre arrêt, c’eſt l’ordre du deſtin :
Souvent pour les vaincus ma voix l’implore envain,
Qu’aujourd’hui la pitié propice à Thémiſcire
Affermiſſe à jamais la paix dans cet empire !

MÉNALIPPE.

On ne peut l’affermir qu’en obſervant les loix,
Leurs leçons & les Dieux ſont les guides des Rois ;
Jadis pour parvenir à la gloire où nous ſommes
De nos champs notre audace extermina les hommes ;
Chacune à ſon Tyran oſant ſe dérober,
Un instant ſous nos coups les vit tous ſuccomber.
Si le Ciel m’eût fait naître en ce jour de carnage,
Que ce hardi projet eût flaté mon courage !
Quel plaiſir de remettre un peuple en liberté,
D’établir de nos loix la ſage auſtérité,
Et délivrant nos cœurs d’un joug que je déteſte
D’immoler les objets d’un charme trop funeſte !
En tous lieux leur orgueil a ſçu nous abaiſſer,
Montrons que ſans leur force on peut les ſurpaſſer :
Uniſſons leurs vertus à notre utile adreſſe,
Et craignons des Captifs la fureur vengereſſe :
La dîme de leur ſang eſt dûe aux Immortels,
Payons ſans différer ce tribut aux Autels ;