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Cent rois vaincus gemissoient à ses pieds,
Les bras au dos honteusement liez :
Lors effrayé de voir telle merveille,

Le ciel encor je lui voy guerroyer,
Puis tout à coup je la voy foudroyer
Et du grand bruit en sursaut je m’esveille.

AU ROY

Le grand Cesar qui les Cesars honore,
Fut de son gendre et du Senat vainqueur
Pour avoir eu de ses soldats le cœur,
Tesmoin Crassin et mille autres encore.

Le grand Henry que son siècle decore,
Seur de la foy du François belliqueur,
Rabaissera l’Espagnole vigueur,
Malgré l’effort du Cesar demi-more.

Ô Prince heureux ! Ceux-là qui sont vivans,
Pour ta grandeur mille morts poursuivans,
Devant le fer de crainte ne pallissent :

Et ceux auxquels on a l’ame ravie,
Apres leur mort encore s’esjouissent,
Pour ton service avoir perdu la vie !

À LA ROYNE

Pour asseurer l’Italie et la France
Contre l’effort de l’Aigle ravissant,
Le ciel unit d’un lien blanchissant
Le lis François au beau lis de Florence.

Ce double lis nostre double esperance,
Nous a produit un bouton florissant,
Par qui sera quelque jour perissant
Ce qui encor nous reste d’ignorance.

Florence a donc par la Françoise main,
Franche du joug dont le tyran Germain
Dessous ses lois maintes provinces lie,

Verra florir le siècle qui couroit,
Lorsque la vierge entre nous demouroit
Et que Saturne estoit roy d’Italie.