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Œuvres complètes de J. Du Bellay

L’antique Rhodien eslevera la gloire
De son fameux colosse, au temple de Memoire :
Et si quelque œuvre encor digne se peut vanter
De marcher en ce ranc, quelque plus grand’faconde
Le dira : quant à moy, pour tous je veux chanter
Les sept costaux Romains, sept miracles du monde.

III

Nouveau venu qui cherches Rome en Rome
Et rien de Rome en Rome n’apperçois,
Ces vieux palais, ces vieux arcs que tu vois,
Et ces vieux murs, c’est ce que Rome on nomme.
Voy quel orgueil, quelle ruine, et comme
Celle qui mist le monde sous ses lois
Pour donter tout, se donta quelquefois,
Et devint proye au temps qui tout consomme.
Rome de Rome est le seul monument,
Et Rome Rome a vaincu seulement.
Le Tybre seul, qui vers la mer s’enfuit,
Reste de Rome, ô mondaine inconstance !
Ce qui est ferme est par le temps destruit,
Et ce qui fuit, au temps fait resistance.

IV

Celle qui de son chef les étoiles passoit,
Et d’un pied sur Thetis, l’autre dessous l’Aurore,
D’une main sur le Scythe, et l’autre sur le More,
De la terre et du ciel la rondeur compassoit :
Juppiter ayant peur, si plus elle croissoit,
Que l’orgueil des Geans se relevast encore,
L’accabla sous ces monts, ces sept monts qui sont ore
Tombeaux de la grandeur qui le ciel menassoit.
Il lui mist sur le chef la croppe Saturnale,
Puis dessus l’estomac assist la Quirinale,
Sur le ventre il planta l’antique Palatin :
Mist sur la dextre main la hauteur Celienne,
Sur la senestre assist l’eschine Exquilienne,
Viminal sur un pied, sur l’autre l’Aventin.

V

Qui voudra voir tout ce qu’ont peu nature,