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Par nous Payens desguisée.
Cestuy-cy fort élégant
Va un songer alléguant.
Cestuy-là trop rigoureux
Approuve l’edict d’Auguste,
Et le bannissement juste
De l’Artisan amoureux.
Vous les diriez, tant ils sont
D’une haineuse nature,
Qu’avecques Timon ils ont
Jadis pris leur nourriture.
Caton semble dissolu
A cestuy-là qui a leu
Dessus leur front Curien,
Du reste, je m’en rapporte
Au tesmoignage que porte
Leur ventre Epicurien.
Puis ces graves enseigneurs
D’une effrontée asseurance
Se prennent aux grands Seigneurs,
Les accusant d’ignorance :
Mesmes leurs clair-voyans yeux
Se monstrent tant curieux,
Que d’abaisser leurs edicts
Jusqu’aux simples damoiselles.
Et aux cabinets de celles
Qui lisent nostre Amadis,
Si le Harpeur ancien
Qui perdit deux fois sa femme,
Corrompit l’air Thracien
D’une furieuse flamme :
Pourtant nous n’avons appris
D’avoir l’amour à mespris.
Dont la saincte ardeur nous poinct,
Non celle desnaturée
Qui de Venus ceinturée
Les loix ne recognoist point.
Mais pourquoy se sent blessé
Par nostre façon d’escrire
Celuy qui a tout laissé
Fors son vice de mesdire !