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Le cœur superbe et despit,
Hérissant sa chevelure
Contre-tourné son allure
Par un mouvement subit :
Ainsi avecq’ noire mine
Tout furieux je chemine
Par les champs plus esloignez,
Remaschant d’un souci grave
Mille fureurs, que j’engrave
Sur mes sourcils renfrongnez.
Tel est le Thebain Panthée
Quand son ame espouvantée
Voit le soleil redoublé :
Tel, le vengeur de son père
Quand les serpens de sa mère
Luy ont son esprit troublé.
D’une entre-suyvante fuite
Il adjourne, et puis ennuite :
L’an d’un mutuel retour
Ses quatres saisons rameine :
Et après la Lune pleine,
Le croissant luit à son tour,
Tout ce que le ciel entourne,
Fuit, refuit, tourne et retourne,
Comme les flots blanchissans,
Que la mer venteuse pousse.
Alors qu’elle se courrousse
Contre ses bords gemissans.
Chacune chose décline
Au lieu de son origine ;
Et l’an qui est coustumier,
De faire mourir et naistre.
Ce qui fut rien avant qu’estre
Réduit à son rien premier.
Mais la tristesse profonde,
Qui d’un pié ferme se fonde
Au plus secret de mon cœur,
Seule immuable demeure,
Et contre moy d’heure en heure
Acquiert nouvelle vigueur.
Ainsi la flamme allumée,