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Or, ces tirants sont tous rompus.

— Rompus par le froid, ajoute l’Américain. Tous les explorateurs polaires connaissent cette particularité. Au-dessous de 50 degrés, le caoutchouc perd toute élasticité et devient cassant. Il eût fallu à votre soupape des ressorts en acier.

Eh oui, il eût fallu au Patrie des ressorts en acier ! mais ses constructeurs ne l’avaient pas destiné à affronter de pareilles températures et c’est d’ailleurs une inconcevable fatalité qui a décidé son commandant à aller chercher aux altitudes de 2.000 mètres le froid qui l’a précipité à terre.

Maintenant, bien que l’angoisse de Georges Durtal ait pris fin, sa conclusion de tout à l’heure est la même :

Le Patrie est cloué au sol.

Tout espoir de le voir remonter dans l’espace avec ses organes essentiels doit être abandonné…

Il y aurait peut-être un moyen, sacrifier la machine, les hélices, transformer cette épave aérienne en un ballon non dirigeable et se confier au vent.

Mais s’il n’y a pas de vent ?

Ou si le vent emporte l’épave indirigeable vers ce réseau complexe d’îles qui bordent l’Amérique du Nord et qui sont autant de déserts ?…

Georges Durtal s’absorbe dans la solution de l’effroyable problème, car cette solution est dominée pour lui par une pensée unique :

Sauver Christiane !