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… Mais que s’il ne ramène pas M. Ramblot sous huitaine, reprit le capitaine, je lui rase son tata et je flanque tout son monde par terre.

— Ci faut pas dire ça ! répliqua Barka ; i faut seulement offrir l’argent !

— C’est vrai ma foi ! Ce mâtin de Barka est un vrai diplomate ! conclut le capitaine.

Le messager partit donc, et ce furent pour nos amis des jours d’attente fiévreuse que ceux qu’il passa en mission.

Enfin, le sixième jour après son départ, il revint avec une mauvaise nouvelle. Lakdar refusait les trente mille francs : il en voulait cent mille ! Et de plus il exigeait le retrait de la colonne française au-delà de Siguiri.

Mais d’autre part le messager déclarait avoir vu M. Ramblot bien portant, enfermé dans une case entourée d’un enclos et attenante au réduit du tata. Fort intelligent, le messager avait bien examiné la position des lieux et donna à cet égard des renseignements précieux pour les chefs de la colonne française. Il avait fait mieux !… Trompant la surveillance dont il avait été l’objet, il avait réussi à causer avec le captif au travers de la palissade, et il rapportait de cette courte entrevue de la confiance pour ses amis.

Énergique, résolu, ne connaissant pas la peur, M. Ramblot faisait dire à M. d’Anthonay que le messager lui avait signalé comme faisant partie de la colonne de délivrance : « Gardez les trente mille francs et marchez ! J’ai les moyens de me barricader au dernier moment dans ma prison et de tenir ; jusqu’au bout. Mais il importe de cacher à l’ennemi votre marche en avant, et d’attaquer à la fois par le massif du Djebel-Daro et par l’est, car j’ai entendu dire que Samory envoyait un renfort par là. Il a en effet appris l’arrivée de votre colonne. Donc pas de temps à perdre ! »

On n’en perdit pas, je puis vous l’assurer, mes enfants !

Le stoïcisme de M. Ramblot avait galvanisé ses amis et Barka lui-même.

Il faut dire que ce dernier avait, pendant la semaine qui venait de s’écouler, signé un traité avec le capitaine Cassaigne qui, en l’espèce, représentait le Gouvernement français.

Ce traité stipulait : que le territoire commandé par Barka restait sous sa domination, et que l’ancien turco conservait ses prérogatives, mais qu’il devenait l’allié de la France ; que les troupes françaises auraient accès sur son territoire et que le drapeau tricolore y serait arboré en permanence.