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Et le pauvre petit homme souffrait de son impuissance à le tirer de ce mauvais pas, quand soudain son regard s’éclaira.

Il avait trouvé !

— Attendez-moi là, maman Catherine, dit-il. Tout n’est peut-être pas perdu.

Vif comme un oiseau, Jean Tapin disparut.

Catherine le vit repasser en courant dans le vestibule ; il portait à la main des papiers.

Et, enfilant un corridor, il alla frapper au bureau de Carnot lui-même.

— Citoyen représentant, dit-il en prenant une attitude militaire, j’apporte des pièces urgentes à la signature.

— Parfait ! mon enfant, répondit Carnot qui connaissait bien le jeune secrétaire de Bernadieu.

Prenant les papiers, il les parcourut rapidement, les signa ; puis les rendant au petit hussard :

— Tiens ! Voilà ton affaire… Est-ce que le colonel est rentré !

— Non, citoyen représentant ; pas encore… et j’en ai bien du chagrin.

— Pourquoi donc ? fit Carnot étonné.

— Parce que, citoyen, il serait sûrement venu vous demander quelque chose.

— Quoi donc ?

— Votre appui pour un de nos amis qui vient d’être arrêté.

Carnot fronça le sourcil. Il y eut un silence ; puis, après réflexion :

— Qu’est-ce que c’est que ton ami ? dit-il.

Alors Jean prit son courage à deux mains et raconta très vite la triste aventure de Maître Sansonneau.

— C’est un brave homme, citoyen, dit-il en terminant. Je peux vous le jurer, il n’a pas cru mal faire.

Le représentant hocha la tête.

— N’importe ! murmura-t-il ; il faut des exemples… où irions-nous si tous les marchands en faisaient autant ? il faut des exemples !…

— Oh ! je vous en supplie, citoyen Carnot !

Jean, les yeux pleins de larmes, avait poussé ce cri du fond du cœur, et Carnot hésita.

Un sourire passa sur ses lèvres rasées :