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un fantôme qu’à un être humain, Et maintenait allez-vous repartir ?

— Oui, oui, je pars », dit Jefferson Hope qui s’était levé.

Sa figure semblait être devenue de marbre tant l’expression en était dure et immobile ; les yeux seuls brillaient d’une lueur sinistre.

« Où allez-vous ? demanda le Mormon.

— Qu’importe ! » répondit le chasseur ; et jetant sa carabine sur son épaule, il redescendit la pente du ravin, puis se perdit au milieu des montagnes, dans les gorges profondes où seules les bêtes féroces établissent leurs repaires ; à cette heure, il était devenu plus dangereux et plus cruel que tous les fauves au milieu desquels il allait vivre !

La prédiction du Mormon ne se réalisa que trop bien. Accablée, soit par l’effroyable mort de son père, soit par le mariage odieux auquel on l’avait contrainte, l’infortunée Lucy ne releva plus la tête. Elle languit encore un mois, puis mourut. La brute qu’elle avait pour mari, et qui l’avait épousée surtout à cause des biens que possédait John Ferrier, ne manifesta pas le moindre chagrin de cette mort ; mais les autres femmes de Drebber la pleurèrent sincèrement et, selon la coutume des Mormons, elles voulurent la veiller pendant la nuit qui précéda les funérailles. Elles se trouvaient toutes réunies autour de sa bière quand, aux premières lueurs du jour,